« Inflexions néoplatoniciennes de la classification des vertus »
José María ZAMORA, Universidad Autónoma de Madrid
« Inflexions néoplatoniciennes de la classification des vertus »
Argument :
La Sentence 32 de Porphyre expose la doctrine des degrés des vertus qui connaîtra par la suite un développement considérable et une fortune extraordinaire dans la postérité. Porphyre prend pour point de départ le traité de Plotin Sur les vertus (Enn. I 2 [19]), mais y introduit toute une série d’innovations. Pour le philosophe de Tyr, l’ascension de l’âme s’accomplit selon une progression systématique qui comporte quatre degrés : (1) les vertus civiques (politikai), c’est-à-dire celles du citoyen ; ce sont les vertus qui intéressent l’âme qui doit vivre dans un corps et qui rendent possible la vie en groupe ; (2) les vertus purificatrices (kathartikai), qui sont celles qui permettent de réduire au minimum l’union de l’âme avec les réalités inférieures et dont la fin est l’assimilation au divin ; (3) les vertus contemplatives (theôrètikai), c’est-à-dire dit celles de celui qui est déjà un contemplatif et dont l’âme, dès lors, contemple l’intelligible ; (4) les vertus paradigmatiques enfin, qui sont celles de l’intellect en tant qu’il est intellect et séparé de l’âme ; elles sont les modèles dont les vertus de l’âme sont les images.
La doctrine porphyrienne des quatre degrés des vertus est reprise par Jamblique, lequel est le premier à établir dans l’école néoplatonicienne un parallèle strict entre la lecture des dialogues de Platon et les étapes de la progression de l’âme dans son chemin de retour vers le divin. L’architecture éthique de cette doctrine des vertus permet ainsi de structurer l’enseignement : chaque vertu correspond à un — ou à plusieurs — dialogue(s) de Platon, ce qui, à partir du quatrième siècle, va fournir un ordre de lecture des dialogues permettant au disciple de parcourir les différentes étapes qui marquent la progression de son âme vers le divin. L’étude des maîtres des écoles néoplatoniciennes nous permet également de voir comment la composition des différentes biographies des diadoques reflètent cette même hiérarchie, depuis la Vie de Plotin, dans laquelle, Porphyre, disciple et éditeur de Plotin, met en œuvre une progression discursive en parfaite adéquation avec les quatre degrés des vertus que dégage la Sentence 32, jusqu’au discours de Marinus, Proclus ou sur le Bonheur, dans lequel celui-ci structure le texte biographique qu’il consacre à son maître en l’articulant à la progression de l’âme qui passe par sept degrés de vertus.
Ces séminaires sont organisés en collaboration avec le Centre d’études sur la pensée antique « kairos kai logos ».
